Archive for septembre, 2008

Nous avons choisi d’accueillir notre 3e enfant à la maison, comme nous l’avions fait pour notre second. Cette décision a été prise par mon mari et moi et ne concerne que nous. Je n’écris pas ce texte pour me justifier ni pour demander l’aval de qui que ce soit. J’écris pour les gens ouverts d’esprit qui sont surpris de découvrir que l’accouchement à la maison est possible et qui n’en voient pas forcément les raisons.

Des raisons, vous allez voir que j’en ai toute une tartine. Il y a 2 façons de regarder les choses, qui vont souvent l’une avec l’autre d’ailleurs : pourquoi je ne veux pas aller en maternité, et pourquoi je veux rester chez moi.

  • L’accouchement

De nombreux choix sont faits de manière systématique dans les maternités pour accélérer le travail. Ce n’est pas forcément la faute du personnel car malheureusement, n’étant pas assez nombreux, n’ayant pas assez de place pour toutes les parturientes, ce personnel n’a souvent pas d’autre choix. Ainsi , on va poser une perf avec de l’ocytonine (hormone pour accélérer les contractions), on va rompre la poche des eaux, on va poser une sonde urinaire, on va faire une épisiotomie… Ce ne sont que des exemples. D’autres gestes sont faits car la sage-femme ne peut rester présente pour surveiller la naissance et aider la parturiente face aux douleurs des contractions : monito en continu (qui fait qu’on est sanglé à la table d’accouchement, même si de nouveaux modèles sembleraient permettre plus de mobilité), péridurale…

Ces gestes ne sont pas anodins, chacun présente des risques (souffrance foetale, travail bloqué, césarienne, forceps…). Or ces risques ne sont pas pris en compte. Souvent, on n’a pas le choix à l’hôpital…

A la maison, aucun de ces gestes ne peuvent être faits, justement à cause des risques qu’ils font encourir. Si l’un d’eux s’avérait nécessaire, il faudrait un transfert en structure hospitalière. Du coup, l’accouchement quand il se passe à la maison est complètement naturel.

L’intimité de la parturiente et du couple n’est pas respectée. On se trouve déjà dans un lieu qui ne se prête pas à une relation intime : une salle froide, avec plein de matériel médical, le bruit du monito, etc. Le personnel nous est inconnu et l’équipe change à telle heure. Nous avons à faire pendant la naissance à plusieurs personnes, parfois des stagiaires en plus. Toutes les heures, une sage-femme vient faire un toucher vaginal pour contrôler l’avancée du travail… Le père a souvent bien du mal à trouver sa place et son rôle pendant cet accouchement.

A la maison, au contraire, on est dans son propre univers, dans son lieu de vie, en général un lieu où l’on se sent bien, qu’on a pu aménager pour l’occasion (lumière tamisée, musique, diffusion d’huiles essentielles, oreillers…) La sage-femme présente nous est bien connue. Nous avons fait tout le suivi de grossesse avec elle et avons tissé avec elle une relation de confiance, une vraie relation humaine ! Elle n’a que rarement besoin de faire de touchers vaginaux car elle s’appuie sur d’autres signes pour déterminer l’avancée du travail, ce qui lui possible du fait qu’elle est quasiment tout le temps avec nous pendant le travail et qu’elle nous connaît bien. Le papa, quant à lui, peut participer à la naissance de bien des façons. S’il souhaite assister à l’accouchement, il peut soutenir sa femme en la prenant dans ses bras, en la massant, en lui disant des mots doux, en lui faisant couler un bain, etc. Il est chez lui, il est bien plus à l’aise pour prendre ces initiatives. Et s’il ne se sent pas d’être présent (mais c’est plus rare étant donné qu’à la maison, le papa a un vrai rôle), il peut quand même se sentir utile chez lui, en préparant des petits encas, des boissons à sa femme, en s’occupant de l’intendance de la maison, en mettant une musique ou des huiles essentielles à diffuser…

A l’hôpital, on est obligé de jeûner pendant l’accouchement (d’où aussi la perf obligatoire). Ma mère compare souvent l’accouchement à une course en haute montagne. Imaginez qu’on demande à un alpiniste de monter à jeûn car il risque de se blesser et si on doit l’opérer, cela serait alors plus facile !!! Ne risquerait-il pas d’autant plus l’accident s’il n’a pas l’énergie nécessaire pour aller au bout de son projet ? Effectivement, l’accouchement est souvent long, très intense, très éprouvant pour le corps et certaines femmes peuvent avoir besoin de manger, de grignoter quelques fruits secs par exemple, et de boire. Cela est possible à la maison, jamais admis à l’hôpital. Et alors après la naissance, c’est grand luxe à la maison : on peut manger un bon petit plat dans son lit, selon ses envies, une grosse pizza, une pile de crêpes, une tartiflette…

Au moment de l’expulsion, les femmes qui accouchent de façon naturelle se mettent souvent spontanément dans des positions qui vont faciliter la naissance du bébé (accroupie, à quatre pattes…) Le célèbre (et antipathique pour moi) obstétritien René Frydman a pu le remarquer dans son livre Les secrets des mères dans lequel il nous invite à découvrir l’accouchement dans le monde. Il remarque que même en France, les sage-femmes commencent à faire accoucher sur le côté car cela facilite l’ouverture du bassin. Il explique que lui apprend mais ne sait pas faire de cette façon : “Pour moi, tout est plus simple quand la femme est allongée sur le dos, j’ai besoin de voir ses yeux” Voilà qui résume bien la différence entre l’accouchement à la maison où l’on va chercher ce qui est plus simple pour la femme (qui est quand même en train d’accoucher là, Mr Frydman !!) et l’accouchement en maternité, où l’obstétricien va chercher ce qui est plus simple pour lui…

  • La naissance

Le bébé vient de vivre un moment très intense et certainement déstabilisant, du moins entièrement nouveau pour lui. On peut supposer que cela peut être quelque peu angoissant et que le bébé sera rassuré de retrouver des repères une fois à l’air en se blotissant contre sa mère dont il reconnaîtra l’odeur, le bruit des battements de coeur, la voix… Or en maternité, on trouve tout un tas de soins à faire au bébé dans ses premiers moments de vie : pesée, mesure, gouttes dans les yeux, aspiration des voies respiratoires, tests d’Apgar, bain, couveuse (!!)…

A la maison, le bébé reste blotti en peau à peau contre sa mère. La sage-femme observe discrètement son comportement. Il n’y a pas de soin urgent dans une naissance physiologique, on laisse le bébé et sa mère faire connaissance doucement. Et puis quand on se décide à faire quelques soins (pesées, test d’Apgar, mais uniquement ce qui n’a pas été observé dans le comportement spontané de l’enfant), ceux-ci sont faits sur le lit de la mère, à côté d’elle.

Au moment même de la naissance, le bébé en maternité est très souvent accueilli avec une lumière violente (pour le confort de l’obstétricien), dans une salle climatisée en été… Dès sa naissance, au moment où il est si vulnérable et où il vit un moment si important de sa vie, les adultes ne tiennent aucun compte des besoins du bébé ! Quel bonheur à la maison de pouvoir se pelotonner sous sa couette avec son bébé en peau à peau, dans son propre lit, sans aucune lumière violente !

  • Le séjour

Le séjour en maternité après la naissance sert à plusieurs choses, notamment à se reposer. Or, comme il est dur de se reposer quand on se fait réveiller tôt pour prendre sa température, quand une fois rendormie, on se fait reréveiller pour prendre le petit-déjeûner, puis pour changer ses draps, etc.

Ce séjour est censé permettre aussi un accompagnement aux premiers pas des parents avec leur bébé. Or les conseils sont bien souvent très infantilisants pour les parents (cf article sur les bébés qui puent), certaines décisions concernant le bébé sont prises sans l’avis des parents (Comme la prise de sang. Il faut savoir que des études ont montré qu’un bébé en train de téter quand on lui fait sa prise de sang ne ressent pas la douleur de la piqûre. Pour les bébés non allaités, un biberon d’eau sucrée diminue également fortement les sensations douloureuses), les puéricultrices proposent fréquemment de placer les bébés à la nurserie…

Les conseils donnés par rapport à l’allaitement sont fréquemment d’un autre âge : biberons de compléments proposés au moindre problème, voire sans aucun problème, ce qui compromet fortement les chances de bien démarrer ; conseils absurdes tels donner 10′ à chaque sein, ce qui ne permet pas au bébé de bénéficier des matières grasses qui ne se trouvent qu’en fin de tétée, les tétées ayant des durées très différentes d’un bébé à l’autre et d’un moment de la journée à l’autre ; autre conseil absurde : attendre 3 heures entre chaque tétée… Sans parler des contradictions d’une puéricultrice à l’autre, des remarques désobligeantes sur les seins qui ne correspondraient pas à la réussite d’un allaitement (trop petits, bouts de seins non sortis, pas de lait, etc.)…

La surveillance médicale du bébé et de sa maman peut être pratiquée aussi bien à la maternité qu’à la maison, où une sage-femme vient chaque jour faire le suivi de couches. Cette possibilité est aussi envisageable après une naissance en maternité, pour des couples qui choisiraient de rentrer chez eux quelques heures après la naissance (mais toutes les maternités ne le permettent pas !! Il faut souvent au moins signer une décharge)

La place du père est bien dure à trouver en maternité… Nous en avons déjà parlé pour l’accouchement. Mais après la naissance, c’est encore pire. Pas de lit pour lui, monsieur n’a plus qu’à rentrer seul chez lui ! Ces quelques jours vont être pour lui remplis de trajets maternité-maison, parfois même en étant obligé de respecter les horaires de visite…

A propos des visites, quel accueil faire à ses invités quand on est dans une chambre d’hôpital, qu’on a rien à leur offrir, et que de toute façon on est trop fatiguée pour supporter une visite d’une demi-heure ! Les horaires sont contraignants et les conditions sont frustrantes. A la maison, le papa peut se charger d’offrir un thé, des petits gâteaux, la maman peut s’isoler avec son bébé quand ils en ont besoin, les parents peuvent choisir d’indiquer à leurs invités un horaire qui les arrange…

Enfin, la nourriture proposée est bien peu appétissante à la maternité. A la maison, on mange ce qu’on veut, ce qu’on aime, à l’heure où on a faim !

Je suis sûre après avoir rédigé cette longue tartine que j’oublie encore des raisons qui me font choisir l’accouchement à la maison !